Céline Bossanne ou l’art du “glamping” à la française

Avec plus de 30 millions de chiffre d’affaires et une croissance annuelle de 20%, la marque de camping nature Huttopia ne cesse de grandir et de s’internationaliser depuis sa création en 1999. Derrière ce succès ? Un couple inspiré qui a su se constituer un véritable empire sans trahir ses valeurs.

« Nous avons créé le lieu de vacances que nous aurions aimé trouver en France lorsque nous sommes revenus de nos deux années passées au Canada  », résume simplement Céline Bossanne, Directrice Générale d’Huttopia & cie. Il y a 20 ans, alors jeune maman de 29 ans, elle décide avec son mari de se jeter à l’eau avec seulement 40 000€ d’apport personnel, « le minimum pour créer une société anonyme ». A l’époque, Céline est en en congés parental après avoir travaillé dans le marketing.

Quant à son mari Philippe, l’actuel PDG du groupe, il œuvre en tant que responsable financier d’une PME industrielle, job qu’il conservera à mi-temps  le temps de créer l’entreprise afin d’assurer au foyer un revenu minimum. Leur motto ? « Redorer l’image du camping et lui redonner ses vraies valeurs : la simplicité et la nature ».  Un pari à contre-courant de ce qui se fait à l’époque puisque le format mobil home est alors en pleine expansion. Pourtant, le couple sait trouver les bons mots pour séduire quelques banquiers audacieux.

Céline Bossanne, DG d’Huttopia

Huttopia, précurseur du « glamping »

Les premiers investissements sont d’abord consacrés à la création de leur prototype de tente avec l’aide d’une agence de design global avec laquelle le groupe collabore toujours. « Nous leur avons confiés à la fois le design du produit mais aussi la communication, ce qui a sans doute été notre meilleure décision  », se souvient la DG. En résulte leur best seller : une tente canadienne offrant à la fois une expérience immersive dans la nature tout en assurant un certain confort.  « Bien qu’étant campeuse, j’aime par exemple dormir sur un matelas.

Dans certains de nos modèles, nous avons même intégré des salles d’eau privatives », explique Céline Bossanne. C’est pourquoi on peut dire que la marque Huttopia a été en quelque sorte précurseur en France du « Glamping » (glamorous camping), terme créé aux Etats-Unis il y a une dizaine d’année. «  A l’époque, les acteurs du monde du camping pensaient que nous étions fous car il est vrai, ce type d’hébergement requière plus d’entretien et de temps pour être démonté. Mais depuis, on nous a maintes fois copiés ! », observe-t-elle.

L’innovation chevillée au corps

Une manière de disrupter dans un secteur traditionnel qui leur a valu d’intégrer dès leur création un programme dédié aux sociétés innovantes au sein de la CCI de Lyon. « Nous étions en pleine bulle internet, et cela a donc été une certaine forme de fierté de pouvoir intégrer ce programme depuis un secteur traditionnel. Même s’il faut bien souligner que sans internet, Huttopia n’aurait jamais existé car c’est notre principal levier de commercialisation. Nous avons toujours désiré être en marge de notre secteur d’activité, et sommes très curieux de ce qui se passe en dehors du monde du camping. Cela s’exprime par exemple dans le choix de nos fournisseurs », rapporte Céline Bossanne.

Crédit R. Etienne

Une réussite hexagonale pas toujours aisée

Lorsque Céline et Philippe Bossanne lancent leurs premiers campings, ils ne les exploitent pas tout de suite sous la marque Huttopia. « Nous avons commencé par reprendre des sites existants en délégation de service public avec notre première marque Indigo (absorbée depuis par Huttopia, ndlr). Cela nous a permis de commencer à travailler la philosophie Huttopia sans dénaturer la marque », explique la DG. Ce n’est qu’en 2005 que le premier village nature Huttopia voit le jour. Actuellement, 8 villages de ce type existent en France.

Pour autant, Céline Bossanne nous confie que le développement de la marque dans l’hexagone ne se fait désormais plus sous la forme de création de campings ex-nihilo. « En France, les tracas administratifs sont tels que nous nous sommes quelque peu découragés. Désormais, nous préférons reprendre des sites (environ 4 à 6 par an) demandant de gros investissements afin de pouvoir y imprimer l’esprit Huttopia. Et ce que nous regardons avant tout, c’est le site naturel. Il faut qu’il ait un véritable intérêt », observe la fondatrice.

 L’internationalisation, un fort levier de croissance

Parallèlement, la marque ne cesse de se développer à l’international. « Nous sommes tous de plus en plus urbains et devons  déconnecter. C’est un besoin humain universel », note Céline Bossanne. Le couple se lance d’abord au Canada, sa « seconde patrie », à travers un contrat signé avec les Parcs nationaux. « Les Canadiens sont très en pointe sur le camping, mais ils apprécient notre french touch », souligne-t-elle.

Bientôt, deux autre sites verront le jour aux Etats-Unis, en création propre cette fois-ci, la réglementation étant plus propice à ce type d’investissement qu’en France. D’autres projets sont en cours en Italie, au Maroc, aux Pays-Bas ou même en Chine sous l’impulsion du gouvernement  qui a décidé de développer le camping. « Cette fois-ci, nous sommes liés à un partenaire chinois. Nous y allons plus par goût de l’aventure car nous savons pertinemment qu’il est très difficile de réussir là-bas. Tout peut aller très vite mais les gens reviennent aussi facilement sur leur parole », rapporte Céline Bossanne.

 

Le plus grand challenge ? Recruter !

Lorsque l’on a derrière soi deux décennies d’existence, il est toujours intéressant de se pencher sur ses plus belles réussites mais aussi les obstacles rencontrés. Pour Céline Bossanne, les premiers recrutements demeurent un souvenir indélébile.

« J’avais l’impression que c’était nous qui passions un entretien (rires). Nous étions toujours très heureux que l’on accepte de venir travailler avec nous. Ma plus grande fierté aujourd’hui est sans doute qu’une petite aventure en duo avec mon mari ait abouti à un effectif de 250 permanents et 1000 salariés en période estivale ! Mais le recrutement est aussi notre plus grand défi. Il est par exemple très difficile de recruter des commerciaux. Aussi, lorsqu’une entreprise grandit, on finit par ne plus connaître tous ses salariés. C’est pour moi l’aspect le plus difficile de la croissance d’une entreprise », souligne-t-elle.

Dans cette aventure, Céline peut compter sur son binôme de toujours, son mari, avec qui elle est extrêmement complémentaire. « Nous nous réjouissons ensemble des réussites, nous consolons des échecs et évitons de faire des erreurs grâce à nos regards croisés. On est clairement plus forts à deux ».

@Paojdo

https://europe.huttopia.com/

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