La révolution Fintech

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Fintech : le terme fleurit un peu partout pour désigner ces jeunes pousses disruptives, nées outre-Atlantique, et dont la principale caractéristique est d’allier innovations technologiques et financières. Depuis quelques années, elles se développent dans plusieurs pays, proposant notamment de nouvelles solutions de crédits et de gestion d’actifs. Au point de bousculer le secteur bancaire. Le temps où les acteurs traditionnels de la finance regardaient de haut les start-upers semble révolu.

« Il n’y a pas si longtemps, les banques pensaient que le phénomène des fintech passerait. Aujourd’hui, le changement de paradigme est total. » Depuis qu’elle a fondé, en 2009, sa fameuse cagnotte en ligne Leetchi, Céline Lazorthes a constaté une évolution dans la posture de ses interlocuteurs : « Au début, on me répondait que c’était impossible. Maintenant, certaines banques essaient de faire la même chose que nous, de lancer des partenariats avec des fintechs… »

De fait, en Septembre 2015, le Crédit Mutuel Arkea a acquis pas moins de 86% du capital de Leetchi. Une annonce couplée d’un accompagnement de 10 millions d’euros pour soutenir le développement de la start-up. « L’appétit des banques pour les fintech est assez impressionnant », commente l’entrepreneure.

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Des institutions bancaires qui lorgnent sur les start-ups

Car Leetchi n’est pas la seule fintech à attirer les convoitises des institutions bancaires : en mars 2015, Boursorama met la main sur la société de technologies financières Fiduceo. En février 2016, le groupe bancaire espagnol BBVA annonce confier pas moins de 250 millions d’euros au fond américain Propel Venture Partners pour les miser sur des jeunes pousses prometteuses de la finance. A croire que les banques redouteraient à leur tour d’être « ubérisées. »

«  Ne pas nous intéresser à ces jeunes sociétés qui développent des applications ou des business models serait une faute professionnelle, » assure Christophe Chazot, directeur de l’innovation chez HSBC. Une nécessité de se pencher sur ces start-ups du numérique. D’autant plus importante qu’une étude du cabinet KPMG publiée en janvier 2016 assure que le financement des fintech a été multiplié par sept en trois ans, culminant ainsi à 20 milliards de dollars.

De quoi éveiller l’intérêt des acteurs établis : « A partir de 2013, nous avons commencé à travailler à la constitution d’une équipe innovation, venant en complément des efforts du reste de la banque, » raconte Christophe Chazot. « Cette équipe a deux rôles: le premier, stratégique, consiste à réfléchir aux évolutions technologiques induites par les fintech, comprendre quels sont leurs impacts pour les banques. Le deuxième est d’investir dans des start-ups importantes pour nous. » Le groupe bancaire britannique a ainsi entre autres investi dans Kyriba, fintech spécialiste de la gestion de trésorerie. « Cela nous permet de mieux inclure les innovations des fintechs », poursuit Christophe Chazot.

Les banques: entre crise et tour d’argent?

Inclure des innovations, celles justement que le secteur bancaire a eu un peu trop tendance à occulter ces dernières années. « Dès 2008, le milieu de la banque a été très occupé à remédier à la crise, à  reconstruire son capital, couper les coûts… », expose le spécialiste innovation d’HSBC. «  Du coup, beaucoup de banques sont un peu passées à côté des évolutions développées dans les fintechs. »

Une crise mondiale, doublée souvent d’un manque d’agilité des mastodontes de la banque. Là où beaucoup de start-ups apparaissent mobiles, fluides, flexibles. « Assises sur leurs fauteuils de leaders, beaucoup de banques n’ont pas vu les fintech arriver, » commente Alexis Gendreau, business developer chez Finexkap. La plateforme d’affacturage, proposant une solution de rachat de créances commerciales, a signé une levée de fonds record de 22, 5 millions d’euros en 2014. « Les procédures internes aux banques sont énormes », poursuit Alexis Gendreau. Pour lui, les institutions bancaires commencent tout juste à prendre le virage numérique.

L’union fait la force?

« Les entrepreneurs des fintechs contribuent au développement de l’écosystème bancaire. Notre industrie n’était pas assez dynamique et avait besoin de renouveau », confirme Christophe Chazot, tablant sur une complémentarité entre jeunes pousses et institutions bancaires parfois centenaires, dont la légitimité constitue souvent une valeur de poids. « La connaissance qu’ont les clients des financements alternatifs constitue notre principal obstacle », admet de son côté Alexis Gendreau. « Beaucoup ont le réflexe aujourd’hui de se tourner vers les banques. Afin d’évangéliser le secteur, nous travaillons à la rédaction d’un livre blanc sur l’émergence du financement non bancaire. »

Pour Christophe Chazot, aucun doute : une fintech comptant HSBC parmi ses investisseurs bénéficie d’un effet positif pour sa réputation, son développement. Céline Lazorthes reconnaît quant à elle que l’acquisition d’une large part du capital de Leetchi par Crédit Mutuel Arkea constitue « un énorme avantage par rapport à nos concurrents ».

L’alliance des banques aux fintech, synonyme du mariage de l’innovation au pouvoir ? Des unions qui s’annoncent en tous les cas de plus en plus fréquentes alors qu’un nouvel enjeu commence à poindre : l’arrivée des GAFA et leurs outils de paiement, tels que Apple Pay ou encore une application de risque-crédit mise au point par Facebook.

Claire Bauchart

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