Où sont les femmes scientifiques?

Où sont les femmes scientifiques ?

Des pionnières du web ont connu ces dernières années des ascensions remarquées. Pourtant, les femmes restent encore très minoritaires dans les filières scientifiques. Enquête.

De grands yeux bleus, des jambes interminables, une belle chevelure exagérément blonde, trop en tous les cas pour être capable de coder ! Elle, c’est Barbie (quasi-)ingénieure en informatique. Quasi, car la poupée icône, clé USB en forme de cœur autour du cou, a besoin de ses collègues, Steven et Brian, pour l’aider à élaborer un jeu vidéo. Cette histoire, racontée dans un livre Barbie, a suscité moqueries et polémiques, au point pour Mattel de se voir contraint de retirer l’ouvrage de la vente.

Education et orientation professionnelle encore genrées

Au-delà de l’anecdote, le faux-pas du géant du jouet révèle la prégnance des stéréotypes. L’étude MutationnElles 2014, vaste enquête réalisée, depuis 6 ans, à un niveau national, souligne notamment les répercussions dommageables des écrans sur les plus jeunes, à une époque où 80% des 11 à 15 ans regardent la télévision tous les jours, et où 60% des adolescents utilisent un ordinateur quotidiennement. Magazines, jeux vidéos, dessins animés mettent en scène des garçons caractérisés par l’action, la connaissance et des filles proies de l’apparence et de l’émotion.

Mini Guide Leader

Autre source de stéréotypes, beaucoup plus insidieuse : la cellule familiale. D’après la même étude, 45% des parents privilégient une orientation scientifique pour leur garçon, un pourcentage qui tombe à 28% lorsqu’il s’agit d’une fille. Ainsi, alors que les lycéennes représentent 45% des élèves de Terminale S, elles ne sont plus que 34%, une fois le bac en poche, sur les bancs des amphithéâtres scientifiques.

Des filières à investir

Conséquence peu étonnante : les femmes représentent à peine 30% des ingénieurs diplômés et n’occupent que 20% des postes dans l’informatique. Dommage lorsque l’on sait que ce secteur présente le double avantage d’afficher un faible taux de chômage ainsi que des salaires situés dans la fourchette haute des BAC +5.

Plus globalement, les sciences et technologies recrutent, avec une progression de 8% entre 2010 et 2014, 10% même pour le numérique.

Des filières d’avenir donc et certaines, défiant les statistiques, l’ont bien compris : entre 2008 et 2012, le nombre de diplômées scientifiques a augmenté de 14%. Une hausse significative même si elle reste moins importante que celle concernant les hommes, s’élevant à 17%.

Entre freins et prémices d’une prise de conscience

Chiffre intéressant également : la proportion de femmes inscrites en formation d’ingénieur a atteint 28% en 2012. Encourageant, mais pour les jeunes filles qui parviennent à ce niveau, gare à la « leaky pipeline », préviennent les auteures de l’étude MutationnElles. En d’autres termes, l’érosion dans ce secteur des carrières au féminin. Car si les femmes représentent 26% des ingénieurs de moins de 30 ans, elles ne sont plus que 10% après 45 ans. Sans oublier qu’elles ne sont que 26% à exercer des responsabilités hiérarchiques, contre 53% de leurs homologues masculins. La conséquence est immédiate sur les écarts de salaire : s’ils sont inférieurs à 10% (tout de même !) en début de carrière, ils grimpent à 34% pour les plus de 45 ans.

Le remède à ces inégalités viendra-t-il des jeunes générations ? S’il est trop tôt pour le dire, relevons que la proportion de réseaux féminins a pratiquement doublé ces dernières années dans les secteurs scientifiques, impliquant parfois jusqu’à une femme sur deux.

L’étude MutationnElles pointe aussi un phénomène plus structurel : les couples de cadres, et donc en particulier d’ingénieurs, ayant entre 31 et 45 ans sont à l’avant-garde de l’égalité entre les sexes. Même si elles reconnaissent toujours en faire plus que leur compagnon, 53% des femmes concernées estiment que les courses sont partagées avec leurs conjoints, un chiffre qui monte à 58% pour le soin des enfants.

Un clivage générationnel dont semblent être conscients ces couples à double carrière : plus de 65% estiment être en rupture avec la vie menée par leurs parents, et 70% affirment transmettre un modèle différent à leurs enfants.

Ces jeunes cadres dynamiques, leviers pour gommer les stéréotypes et renvoyer les Barbies incompétentes au placard ? Attendons de voir…

Claire Bauchart

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