Muriel Hermine: confessions d’une sportive

Muriel Hermine

Quadruple championne d’Europe de natation synchronisée, à tout juste 50 ans, Muriel Hermine a déjà vécu plusieurs vies. Aujourd’hui, elle transmet aux managers les valeurs fondamentales du sport, qu’elle juge intimement liées au monde de l’entreprise.

Quadruple championne d’Europe de natation synchronisée

A 25 ans, alors quadruple championne d’Europe, finaliste par deux fois aux Jeux olympiques, Muriel Hermine décidait de mettre un terme à sa carrière sportive. Quelques années plus tard, elle effectuait une reconversion remarquée dans le monde du spectacle, créant des shows qui ont réuni plus de deux millions de spectateurs dans le monde.

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Puis une décennie plus tard, dans les années 2000, Muriel Hermine se lançait dans l’humanitaire en fondant l’association « J’ai un rêve », qui vient en aide aux enfants et adolescents défavorisés. Depuis 2010, la championne a pris un nouveau tournant puisqu’elle donne désormais des conférences auprès des jeunes (et moins jeunes) managers, pour tenter de leur transmettre les valeurs du sport, si pertinentes dans tous les domaines de notre vie.

« Ce qui importe, ce n’est pas comment on a réussi, mais pourquoi »

Rigueur, persévérance, confiance, énergie, indépendance, puissance, capacité à gérer les échecs… : les qualités développées à travers le sport sont innombrables, et de plus en plus convoitées par les entreprises, mais encore trop superficiellement selon la championne. « Elles cherchent trop à savoir COMMENT les athlètes ont réussi, et pas assez POURQUOI, alors que c’est l’essentiel », soutient-elle.

Pour autant, il est très encourageant que le monde de l’entreprise s’intéresse à ses valeurs et encourage les salariés à pratiquer le sport. « Les Français sont peu sportifs, et lorsque je leur parle d’activité physique, beaucoup pensent à la douleur. Mais c’est faux : l’important, c’est avant tout la régularité, et non la souffrance. J’essaie de faire comprendre aux personnes que je coache que le sport est là pour les équilibrer physiquement, mentalement et émotionnellement », explique Muriel Hermine.

« On ne réussit qu’en développant ses talents »

« Nous sommes le résultat de nos choix et de notre environnement », martèle la championne, et à tout moment de notre vie, il faut se demander si l’on est heureux de se lever le matin pour aller travailler. Car, comme le sportif, seule la passion peut nous mobiliser. « Des choix qui étaient bons pour nous il y a 10 ans peuvent ne plus nous correspondre », et « la vie nous envoie des signes qu’il faut écouter », conseille Muriel Hermine, « avant que ce soit votre corps qui vous force à réagir ».

La sportive estime qu’il est dangereux de trop attendre pour changer, d’abord car cela nous laisse peu de temps pour faire nos choix. A tout moment de notre vie, « il faut être ouvert aux opportunités pour préparer notre avenir ».Pour nous aider à faire nos choix, il faut avant tout réfléchir à nos talents. « On a trop tendance à vouloir gommer nos faiblesses, mais la compétition m’a démontré que l’on ne gagne que grâce à nos talents », analyse Muriel Hermine. « Une équipe qui gagne est une équipe avec des talents complémentaires exploités à fond ». Quant au manager, il doit non seulement impérativement faire ce travail sur lui-même, mais aussi « avoir toujours 500 mètres d’avance sur son salarié ». « Dans un monde où tout est mouvant, il faut revenir à nos fondamentaux », soutient la sportive.

« Je ne pense pas qu’on puisse réussir et être aimé »

La natation synchronisée a permis à Muriel Hermine d’explorer à la fois le sport collectif et le sport individuel. Mais elle en retire une leçon fondamentale : « une victoire n’est jamais individuelle ». Proches, coach, sponsors… : tous ont contribué à son succès. « Penser que l’on peut réussir seul face au monde est une erreur importante suscitée par l’ego, que j’ai faite moi-même », confie-t-elle. Mais si les autres sont indispensables pour progresser, il faut aussi savoir se détacher du regard qu’ils portent sur nous.

« Je ne pense pas qu’on puisse réussir et être aimé, du moins, pas au début », avance la championne, qui a elle-même vécu de grands moments de solitude lorsqu’elle a intégré l’équipe de France alors qu’elle n’avait que 14 ans. Muriel Hermine a donc finalement entrepris une « cure de désintoxication affective », et s’est davantage concentrée sur les critiques que sur les flatteries pour avancer. « Certaines personnes préfèrent rester dans la moyenne car elles ne veulent pas attirer la jalousie ou la convoitise. Il faut qu’elles se demandent d’où vient leur besoin d’être à ce point aimées », souligne la championne.

« Il faut répartir son temps en petites victoires »

« La réussite ne peut pas être une destination, elle ne peut être qu’une expérience sur notre route », soutient Muriel Hermine. Jamais la petite fille ne se serait imaginé participer aux Jeux olympiques. « Il faut du temps pour construire une carrière, c’est la première des choses à retenir.

Ensuite, il faut répartir son temps en petites victoires », poursuit-elle. L’entraînement physique des sportifs de haut niveau est si intense qu’ils envisagent les échéances les unes après les autres, et repoussent toujours plus loin leurs limites. C’est comme ça que le sportif construit sa confiance en lui.
Le travail est fondamental chez les sportifs. D’abord, parce qu’ils ne pourraient pas exceller sans ça, ensuite, car une bonne préparation leur permet de se réfugier dans des automatismes, et de ne pas se laisser déborder par le stress. « Quand je faisais mon programme, c’était comme si je me dédoublais, comme si mon corps se détachait de mon esprit, et c’est comme ça que je lâchais prise », explique-t-elle. Muriel Hermine pratiquait également beaucoup la visualisation.

Elle pensait à tout le chemin à parcourir pour atteindre son objectif et décelait au passage ses peurs et ses faiblesses. C’est ainsi qu’elle construisait sa stratégie, en terminant toujours sa visualisation par un succès.
Le sportif sait aussi maîtriser son stress pour le transformer en énergie. « Les gens ont une vision négative du stress. Certes, parfois il est nuisible, mais il est avant tout une émotion qui peut nous faire du bien quand elle tend vers quelque chose de positif », soutient Muriel Hermine. Bien sûr, dans sa carrière, le sportif connaîtra très tôt l’échec, mais sa force sera d’en tirer les enseignements pour avancer. En somme, « le sport, c’est avant tout une école de la vie ».

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