Méditation et business : vers un leadership bienveillant

Méditation et business

Sébastien Henry est coach de dirigeants et formateur en management. Dans son livre « Ces décideurs qui méditent et s’engagent » (éditions Dunod), il nous explique les vertus de la pratique méditative en entreprise. Interview.

Comment la méditation est entrée dans votre vie ?

Sébastien Henry : Mes premiers contacts avec la méditation datent d’il y a presque 25 ans. J’étais alors étudiant au Japon et à une période charnière de ma vie. La méditation a alors été une aide formidable et m’a permis de faire émerger l’essentiel.

Guide Dev Persot

De plus en en plus de grandes entreprises comme Google intègrent la méditation dans leurs programmes. Cependant, on peut parfois craindre qu’elle ne soit perçue que comme un moyen d’accroître encore la performance des salariés.

Mais d’après vous, une vraie pratique méditative n’est pas compatible avec le maintien du « business as usual » ?

Sébastien Henry : Oui cela n’est pas compatible selon moi. La méditation n’est pas qu’un outil. On ne se met pas à méditer pour atteindre un objectif de bien-être, c’est davantage une conséquence. En ce sens, j’aime bien la métaphore du jardin : on le cultive, et peut alors en ressortir une belle récolte. Ainsi, on ne cherche pas à atteindre d’objectif avec la méditation. Cela demande un lâcher prise assez difficile pour une entreprise soumise à de fortes contraintes économiques.

L’intérêt porté à la méditation par les entreprises est relativement récent. Pensez-vous que cet engouement ira au delà du simple effet de mode ?

Sébastien Henry : Il est clair que nous traversons une crise économique. Mais par delà, il existe selon moi une autre crise encore plus profonde : une crise de la sagesse. Nous nous sommes coupés de l’héritage de nos ancêtres transmis au fil des siècles. Avec le digital, nous sommes dans l’hyperconnexion, et cela ne risque pas de changer. Le résultat est que nous nous déconnectons de plus en plus de nous-même. Je ne pense pas que cela soit uniquement passager. Voilà pourquoi la pratique de la méditation est plus que d’actualité.

Pour vous, la sagesse n’est pas une qualité mais une pratique (incarnée en actions), la possibilité de créer de nouveaux modèles de société ?

Sébastien Henry : Oui, nous vivons dans un monde de fous, et en cela, la sagesse est révolutionnaire. Pour moi, la méditation est l’art de chercher des pensées et actions justes. Faire émerger la justice passe par une certaine intériorité. Avec cette pratique, nous cultivons un nouveau regard sur le monde. Vont alors émerger des idées auxquelles nous n’aurions pas pensé par le biais du raisonnement. Nous allons aussi accéder à une forme d’intuition. Irrémédiablement, la méditation va permettre de faire émerger de nouvelles idées.

Vous insistez sur l’importance du caractère laïque de la méditation. Pour autant, cela n’ôte en rien sa spiritualité ?

Sébastien Henry : Historiquement, les religions ont investi le spirituel dans nos sociétés. Mais la méditation permet également d’accéder à une autre forme de spiritualité, et de façon laïque. Sur ce point, d’autres l’ont exprimé bien mieux que moi, à l’image de Luc Ferry.

Peut-on introduire la méditation en entreprise, ou doit-elle rester une pratique individuelle ?

Sébastien Henry : Aucune entreprise ne pourra forcer ses salariés à méditer, cela demeure une démarche individuelle. Pour autant, l’intérêt de l’aborder en entreprise est que cela crée une dynamique collective entre les membres d’une équipe. La méditation génère de l’harmonie, de la bienveillance. Les gens apprennent à se connaître et s’apprécier. Lorsque l’on introduit la méditation en entreprise, je préconise pour ma part environ 6 à 8 séances réparties sur deux à trois mois. Dans la méditation, il n’y a rien à réussir, rien à atteindre, pour autant, nous devons garder en tête que les entreprises ont des objectifs précis, et nous devons ainsi réussir à faire un pont entre ces deux mondes.

« Rien à atteindre, rien à réussir » dites-vous. Cela demande donc au décideur de s’adapter à un nouveau mode de pensée ?

Sébastien Henry : On ne demande pas au décideur de changer. On lui propose simplement de découvrir le bien que cela fait de prendre 15 minutes dans sa journée avec aucun objectif à réussir ou à atteindre. Cela offre simplement un espace de ressourcement profond et de lucidité sur soi.

Quelles sont les qualités développées par les dirigeants à travers la méditation ?

Sébastien Henry : Cela dépend des personnes, mais j’observe  souvent que la méditation permet dans un premier temps une certaine forme de ressourcement, une meilleure connaissance de soi, puis d’apporter plus de clarté dans la prise de décision, et le courage d’aborder plus rapidement les décisions délicates. Dans un second temps, la méditation peut développer des qualités d’empathie, une capacité à mieux comprendre les personnes autour de soi, et davantage de créativité. La méditation apporte bien plus qu’un simple moyen pour abaisser son niveau de stress, c’est ce que découvrent en général les décideurs.

Dans ce livre, vous avez interrogé des décideurs du monde entier. Où en est-on en France car peu de dirigeants parlent dans l’hexagone de leur pratique méditative ?

Sébastien Henry : Effectivement, ces dirigeants demeurent une minorité, mais une minorité grandissante et active. Je suis en première ligne donc je vois une vraie évolution depuis 2, 3 ans. Pour le moment, les entreprises parlent plus facilement de mindfulness, terme moins connoté. En France, je travaille par exemple avec Sodexo et la MAIF qui sont très engagées. Maintenant, c’est une démarche qui demande une certaine discipline et qui n’intéressera jamais tout le monde. Mon travail est simplement d’inviter le plus grand monde à tenter l’expérience.

Retrouvez le site de Sébastien Henry en cliquant ici. Découvrez aussi l’association meditationleadership.com qui organise des cycles de méditation pour les dirigeants à Paris, Genève et bientôt à Lyon.

@Paojdo

0
    0
    Votre panier
    Votre panier est vide