INES DE LA FRESSANGE… Un peu, beaucoup, passionnément, à la folie !

Inès de la Fressange
Celle qui incarne toute la créativité et l’impulsion de la maison Roger Vivier se livre avec un naturel bluffant aux lectrices de Business O Féminin.

Piquante, charmante et on ne peut plus spontanée ! Celle qui incarne toute la créativité et l’impulsion de la maison Roger Vivier se livre avec un naturel bluffant aux lectrices de Business O Féminin. Une rencontre qui se partage, une interview qui se dévore…

Comment l’aventure Roger Vivier a-t-elle commencé ?

Inès de la Fressange : Lorsque Diego Della Valle, patron du groupe Tod’s, a acheté le nom, il m’a demandé de l’aider à relancer l’affaire. A l’époque, il ne savait pas que j’avais rencontré Roger Vivier lui-même, qui m’avait proposé la même chose.

Où puisez-vous votre inspiration ?

Inès de la Fressange : Dès lors qu’une société me consulte, j’observe attentivement son patrimoine, je choisis ce qu’il faut mettre en valeur tout en évitant d’appliquer le même système que pour une autre. J’accumule les documents, livres, photos et fais comprendre au propriétaire ce qu’il possède – car on vend mieux quand on connaît, et plus on connaît plus on aime. Ensuite, l’important est de ne jamais avoir de préjugés et de ne pas faire comme les autres.

Vous êtes mannequin, égérie, symbole du chic à la française, entrepreneuse, mère de famille accomplie… Quel est votre secret pour concilier ces différentes casquettes ?

Inès de la Fressange : J’accepte d’emblée de ne pas être parfaite ! Aussi, relativiser est un exercice quotidien. Il faut perpétuellement prendre du recul, être attentive aux symptômes du stress et ne pas perdre de vue que les choses sont rarement graves. Mon optimisme (qui devient un sens du risque), un peu d’insouciance et beaucoup d’humour, mais surtout la conscience d’avoir beaucoup de chance à la maison comme au bureau, sont pour moi la clef du bonheur. Et je procrastine sans culpabilité !

Dans les années 1990, vous avez notamment lancé votre propre griffe. Qu’est-ce qui vous a donné envie d’entreprendre après le mannequinat ?

Inès de la Fressange : J’étais un mauvais mannequin : qui parlait trop, donnait son avis, et ne faisait pas comme les autres… Grâce à cela peut-être, je suis entrée dans la meilleure école de mode du monde où j’ai eu le meilleur prof du monde : Chanel et Karl Lagerfeld qui m’a dit : « Un jour, ce sera toi qui créeras ta propre collection ». A cela, j’ai répondu que je ne saurais faire que des vêtements mettables et relativement basiques. Il m’a répliqué : « Cela pourrait être un koncepteu ! » (un “concept” prononcé avec l’accent de Hambourg). Donc, lorsque Henri Racamier m’a proposé de lancer ma propre marque, la petite graine déposée dans mon cerveau par le grand maître a germé. Mais entreprendre, cela veut juste dire “avoir envie”. Et pour être styliste, il suffit de désirer des choses qui n’existent pas.

Quel est votre souvenir le plus mémorable de l’époque où vous collaboriez beaucoup avec la maison Chanel et Karl Lagerfeld ?

Inès de la Fressange : Un jour, Karl a annulé une robe qui était terminée. Tenant compte des heures de travail et de la déception des couturières, je l’ai enfilée afin de prouver à Karl que c’était une erreur. Il a changé d’avis et les filles des ateliers se sont cotisé pour m’offrir un cadeau. Cela ne se fait jamais, j’ai donc été très touchée.

Comment percevez-vous la businesswoman d’aujourd’hui ?

Inès de la Fressange : Comme le businessman ! Non, en fait, j’ai plutôt un a priori favorable lorsque je sais que je vais avoir affaire avec une femme – ce qui est une forme de sexisme, mais je compte sur une certaine solidarité féminine ! Par exemple, lorsque j’ai rencontré la directrice de L’Oréal Paris, Isabelle Guyony-Hovasse, nous étions complices et copines après un quart d’heure. Il me semble que l’importance accordée à la carrière, l’autorité, la hiérarchie ou la réussite est atténuée par rapport aux hommes. Mais en vous disant cela, je le regrette déjà ! Disons qu’il y a des imbéciles partout, même chez les femmes ! (rires)

Comment pensez-vous que l’industrie de la mode va évoluer dans les prochaines années ?

Inès de la Fressange : Ce n’est pas le secteur le plus inquiétant en France. Particulièrement en ce qui concerne le luxe. Un jour, les dirigeants français réaliseront que c’est une industrie florissante, qui exporte énormément, engage un monde fou et est l’étendard glorieux de l’Hexagone. Ils prendront conscience aussi que beaucoup de fabricants ont disparu (soieries de Lyon, lainière de Roubaix, souliers de Romans…) et que l’artisanat et les métiers du luxe doivent être aidés et protégés. Car le rare, l’unique, le “bien fait” et la créativité sont très recherchés. La mode ne meurt pas, il faudrait juste que la France ne perde pas son titre de pays de la mode.

Selon vous, la mode a-t-elle un avenir au sein de la sphère digitale ?

Inès de la Fressange : Bien sûr. On peut même dire que c’est déjà du passé et assurément du présent ! Du passé car cela fait longtemps que la vente par correspondance est installée. La Redoute, par exemple, fait appel à différents créateurs chaque saison. Mais c’est aussi du présent car la mode et les images qui y sont liées sont diffusées à la vitesse de la lumière et à grande échelle grâce à des sites comme Style.com, entre autres. Le phénomène s’ancre par ailleurs dans l’avenir : aucune marque n’échappe au digital dorénavant et les community managers sont recrutés pour contrôler les sites, Instagram, Facebook, Twitter, et la vente en ligne, même pour les marques de prestige.

Les grands magasins américains ne s’installent plus dans certaines villes des Etats-Unis, les jugeant trop petites. Mais ils savent en revanche que certains habitants ont un fort pouvoir d’achat. Leurs sites Internet sont donc très soignés. Je pense également que les commandes spéciales, les produits personnalisés ou fabriqués en petite quantité vont se déployer de plus en plus à long terme. Aujourd’hui, on peut sélectionner en ligne les options pour une voiture, il n’y a aucune raison que cela ne soit pas le cas pour un jupon !

Comment est née l’idée d’écrire La Parisienne, devenu le guide incontestable de toute Parisienne (ou même touriste, puisqu’on l’a vu entre les mains de fashionistas japonaises) qui se respecte ?

Inès de la Fressange : Aligatô ! Au départ, je ne souhaitais donner que mes adresses à Paris, parce qu’on me les demandait souvent. Mon éditrice (Teresa Cremisi de Flammarion) voulait que je propose des conseils de style, ce que je trouvais prétentieux. Avec Sophie Gachet, la coauteure, nous avons donc préféré tenter de définir ce qui fait « la Parisienne », dont on me parle tant à l’étranger. En cherchant, nous avons réalisé que ce qui semblait être un cliché était une réalité (il y a une différence !).

Mais je crois que le succès du livre vient de ce qu’il a été écrit comme une lettre à une copine : sincère, honnête, avec plein de photos et en tenant compte du fait que la lectrice n’était ni milliardaire, ni une pro de la mode, pas plus que mannequin ou fashion victime. Je ne sais pas trop comment l’expliquer, mais ce qui est dingue, c’est qu’on en a vendus plus d’un million d’exemplaires !

Quelles adresses phares pourriez-vous souffler à nos lectrices à NYC, Paris et Londres notamment ?

Inès de la Fressange : Pour Paris, il suffit de consulter le guide. Une adresse comme la boutique de vêtements Sœur, par exemple, n’existe pas ailleurs . Pour Londres et NYC, je pense qu’il vaudrait mieux que Flammarion demande à une autochtone !

Mais puisque c’est vous… :

– A Paris : Le Bon Saint Pourçain, rue Servandoni, pour sa tête de veau

– A Londres : Brown’s Hotel, où Kipling a écrit Le Livre de la Jungle

– A New York : Save Khaki, une boutique de vêtements pour hommes et femmes

Si nos sources sont exactes, vous êtes également marraine d’une association. Pouvez-vous nous en dire un peu plus ?

Inès de la Fressange : En effet, il s’agit de l’association Mécénat Chirurgie Cardiaque qui, grâce au professeur Francine Leca, sauve des enfants de tous les pays souffrant de problèmes cardiaques. L’initiative implique des familles d’accueil bénévoles et tout un tas de gens épatants. Je ne suis qu’un des porte-parole car l’association ne fait pas de publicité. Deux fois par an, entre autres, je vais au Café de la Paix vendre des petits-déjeuners et des goûters. Les gains sont reversés à l’association, qui les utilise pour opérer les enfants qui, par définition, ne bénéficient pas de la sécurité sociale.

http://www.mecenat-cardiaque.org

Avez-vous des projets à venir dont vous pourriez nous toucher un mot ?

Inès de la Fressange : Fabrice Boé, un ancien de Prisma, L’Oréal et Hermès, a réuni des investisseurs pour relancer la marque qui porte mon nom. J’en suis la directrice artistique et nous avons déjà plusieurs licences. Il nous manque celle des vêtements, mais après votre article cela ne saurait tarder ! J’aimerais très vite rouvrir une boutique, pas forcément uniquement avec mes créations. Je voudrais mettre en avant des jeunes talents et des objets achetés lors de mes voyages. Je continue par ailleurs à travailler avec Roger Vivier, Allianz et L’Oréal. Et je pars en vacances dimanche !

Last but not least, un petit mot pour les lectrices de Business O Féminin ?

Inès de la Fressange : Alors voilà :

Chère petite lectrice de Business O Féminin, je sais que tu te débrouilles très bien (plutôt mieux que certains de tes collègues…). La pub « J’assure en Rodier » a été conçue pour toi, tu en fais un max et tu es épatante.

MAIS ! Pense au dernier jour de ta vie : quelles seront tes fiertés ? Quels seront tes regrets ? Qu’est-ce qui sera important à tes yeux ? (En dehors des lunettes que tu utiliseras depuis quelques années déjà…)

En résumé, il faut vite déterminer ce que sont nos priorités, sécher les réunions pour aller voir danser nos enfants, apprendre à rentrer tôt, à déléguer… Ne pas oublier de dire à son mari qu’il est beau (effet magique, tu verras !) et garder en tête que la plupart des événements ne méritent pas qu’on s’énerve. Bon, tout le monde a quelqu’un dans son entreprise qui lui casse les pieds, mais imagine qu’il a peur. Si c’était ton meilleur ami, tu aurais de l’indulgence pour lui. Aussi, au lieu d’avoir les yeux rivés sur ton ordi (puisque tu es arrivée à la fin de cet article), écris un texto à cette copine avec qui tu dois déjeuner depuis 6 mois !! Et envoyez-moi toutes une carte postale ensuite (29 rue du faubourg Saint-Honoré) pour me dire si vous viendrez dans ma boutique. Merci !

 

Linda Addouane

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